La déconstruction : une voie d’avenir
À l’heure où les enjeux environnementaux se font pressants, la Régie intermunicipale de traitement des matières résiduelles de la Gaspésie (RITMRG) a décidé d’opter pour une approche audacieuse en matière de construction : déconstruire plutôt que démolir.
Cette démarche permet de donner une deuxième vie à des matériaux destinés à l’enfouissement. Dans un projet pilote amorcé en 2022, la RITMRG a testé cette nouvelle façon de faire en déconstruisant l’ancienne quincaillerie BMR de Grande-Rivière et l’ancien Bistro Cyr de Chandler.
La déconstruction avait deux objectifs : optimiser les ressources en permettant leur réemploi dans un faible rayon territorial et réduire la quantité de matière acheminée à l’écocentre.
Chandler : des matériaux destinés à une école
Lors de la déconstruction du bistro de Chandler, le taux de réemploi a été un peu plus faible, car le bâtiment était abandonné depuis de nombreuses années et une partie avait été ravagée par un incendie, explique Nathalie Drapeau, directrice générale de la RITMRG.
Le processus de démontage s’est fait par étapes. « Nous avons commencé par déconstruire la toiture, ajoute-t-elle. Puis la devanture a été défaite panneau par panneau. » Tous les matériaux qui pouvaient être réutilisés ont été directement acheminés vers une école de Val-d’Espoir, qui devait être rénovée pour être transformée en école de permaculture. Des briques, du bois, quelques pièces de métal, des portes, des fenêtres et même de l’ameublement ont pu être réutilisés.
Au bout de deux semaines de déconstruction, ce qui restait était trop contaminé. Le bâtiment a été démoli. Les matériaux ont été acheminés vers l’écocentre, puis ont été transformés en matière de recouvrement journalier afin de couvrir l’enfouissement. « C’est une fin moins noble, dit Nathalie Drapeau, mais cela permet tout de même de leur donner une deuxième vie. »
Grande-Rivière : rendre les matériaux accessibles
Le projet de Grande-Rivière comportait quatre bâtiments en meilleur état. Selon Nathalie Drapeau, « le site était parfait pour la déconstruction. Il y avait beaucoup de belles pièces de bois et des poutres ».
Lors de la déconstruction de l’édifice principal, on a d’abord démantelé l’extérieur, en enlevant la tôle, les portes, les fenêtres et la toiture. Comme il s’agissait d’un projet d’envergure et que les employés ne pouvaient pas déconstruire planche par planche, les responsables du chantier ont fait appel à une équipe de conditionnement. « Nous avons embauché deux personnes qui enlevaient les clous, défaisaient les panneaux et classaient les matériaux. »
Une fois le premier bâtiment déconstruit, les matériaux ont été mis en vente, selon leur valeur sur le marché, avec une réduction de 50 %. « L’accueil de la population a été très positif, poursuit Nathalie Drapeau. Nous avons eu environ 120 visiteurs et visiteuses et nous avons récolté 10 000 $. Quand le dernier bâtiment sera démantelé, nous ferons une autre vente. »
Une pratique prometteuse
Si l’objectif était d’abord environnemental, l’aspect économique n’est pas à négliger, car le processus a été réalisé à coût nul. « Nous arrivons à des coûts équivalents, dit Nathalie Drapeau, ce qui veut dire que pour certains sites, cette méthode pourrait permettre de faire des économies. »
Une équipe de chercheurs de l’ÉTS s’est jointe au processus pour théoriser l’expérience et l’arrimer avec sa mise en place sur le terrain. Ils ont cartographié le processus afin de planifier une séquence et définir toutes les étapes d’une déconstruction.
« Nous avons élaboré des outils afin de faire part de notre expérience, explique Nathalie Drapeau. Nous sommes rendus là dans la gestion des bâtiments en fin de vie au Québec. J’espère que notre initiative inspirera d’autres municipalités ! »
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