Le génie à l’ère des changements climatiques
Toits verts, bâtiments et modes de transport peu énergivores, adaptation à la montée des eaux… De nombreuses solutions permettant de faire face aux changements climatiques proviennent du monde du génie. Pour avancer vers une économie décarbonée, les professionnels et les entreprises doivent ainsi connaître les impacts de ces dérèglements et les risques associés à la pratique.
« Les professionnels du génie ont un rôle fondamental à jouer dans la réflexion, la mobilisation et l’adaptation face aux changements climatiques », estime Daria Hobeika, avocate de formation et cofondatrice de Clearsum, un cabinet canadien spécialisé en gestion des risques liés au climat.
Dans ce contexte, Mme Hobeika propose le webinaire « Comprendre les changements climatiques au-delà du net zéro : le rôle de l’ingénieur dans l’économie sobre en carbone de demain ». Il existe actuellement un fort mouvement vers le net zéro (une diminution des émissions de gaz à effet de serre aussi proche que possible de zéro, les émissions restantes devant être recaptées par les océans et les forêts, par exemple).
Or, certains impacts sont inévitables malgré la réduction des GES, comme la montée des eaux dans les villes côtières ou construites autour de fleuves et de rivières. La pratique des professionnels en génie est donc nécessairement touchée par ces changements qui impliquent des risques physiques et des risques de transition.
Gérer les risques
S’adapter aux dérèglements climatiques implique d’identifier ces risques, qui peuvent être physiques et ponctuels, comme les événements météorologiques extrêmes, ou bien chroniques, comme la hausse progressive des températures. « Ensuite, il faut prendre en compte les risques de transition, à savoir les facteurs externes et les acteurs sociaux qui pourraient mettre de la pression sur l’entreprise », explique Daria Hobeika.
Ces sources de pressions sont regroupées en trois catégories. La première comprend les parties prenantes conscientisées, c’est-à-dire les consommateurs qui changent leurs habitudes en fonction de valeurs écologiques, les employés qui resteront ou non dans l’entreprise selon ces mêmes valeurs, et les actionnaires qui peuvent ajouter une pression supplémentaire.
Le second groupe inclut les investisseurs, les banques et les assurances formant le système financier. Il prend en compte le risque et la « résilience climatique » pour financer un projet ou non. Autrement dit, pour un projet de construction de bâtiment donné, sait-on si l’infrastructure pourrait se détériorer rapidement à cause des grandes chaleurs ou bien si elle est située dans un endroit où les risques d’événements météo extrêmes sont importants?
Enfin, les entreprises doivent prendre en compte les politiques publiques et réglementaires. « Dans le cas du bâti, il arrive que des villes décrètent des zones zéro carbone », illustre Daria Hobeika, qui a exercé une douzaine d’années dans le domaine de la politique publique provinciale. « Cela implique de construire différemment ou de modifier le bâti existant, mais aussi les modes de transports pour y accéder, de même que la création de nouvelles technologies pour capter le carbone. »
En intégrant tous ces éléments, le domaine du génie peut devenir un véritable catalyseur du mouvement vers la décarbonisation, selon Daria Hobeika, qui observe un intérêt grandissant des entreprises pour les enjeux climatiques.