Montréal, le Hollywood du jeu vidéo

Si Montréal est aujourd’hui l’un des plus grands pôles mondiaux de l’industrie du jeu vidéo, c’est d’abord et avant tout grâce à la force de sa main-d’œuvre, selon les experts et expertes du milieu.

Il aurait été bien difficile de prévoir l’ampleur qu’a connue l’expansion de l’industrie montréalaise du jeu vidéo lorsque le gouvernement péquiste de Bernard Landry a mis en place les crédits d’impôt destinés aux jeux vidéo, se remémore le directeur général de La Guilde du jeu vidéo du Québec, Jean Jacques Hermans.

« Aujourd’hui, Montréal est devenue pour le jeu vidéo ce qu’Hollywood est au cinéma, illustre-t-il. Les personnes et les entreprises viennent de partout au monde pour faire leur marque ici. »

Philippe Valentine, directeur, Développement des affaires — Europe du Sud et de l’Est chez Montréal International, travaille au quotidien avec les entreprises du secteur qui cherchent à s’installer ici. Il abonde dans le même sens : « Honnêtement, on n’a pas besoin de vendre la ville plus qu’il ne le faut : les gens connaissent déjà très bien Montréal dans l’industrie », confie-t-il.

Un bassin de main-d’œuvre unique

Si les avantages fiscaux instaurés en 1997 ont permis d’attirer dans la métropole Ubisoft et les autres grands noms de l’industrie, ils ne suffisent toutefois pas pour expliquer les succès continus du secteur, analyse Jean Jacques Hermans. En effet, si le Québec a peut-être disposé d’un avantage fiscal au début, la province a rapidement été imitée par d’autres territoires, comme le Japon et la Californie, précise-t-il.

Ce qui n’a pas empêché la multiplication des studios indépendants, dont le nombre a tout simplement explosé. Alors qu’ils étaient environ une quarantaine dans la métropole en 2015, ils sont maintenant plus de 285, mentionne le directeur de La Guilde.

Pour Philippe Valentine, ce qui donne son avantage à Montréal et qui explique cette expansion soutenue, c’est avant toute chose la qualité et la diversité du bassin de main-d’œuvre qu’elle peut offrir à l’industrie.

Un avantage qui serait selon lui une conséquence directe de la grande qualité et de la variété des formations pertinentes pour l’industrie données par les universités, les cégeps et les écoles techniques spécialisées de la région. « Nous sommes le seul endroit au monde où l’on peut faire des études de maîtrise spécialisées en jeu vidéo. Ce n’est pas rien », souligne-t-il.

Encore de la place pour la relève

Bon an mal an, ce sont environ 450 finissants et finissantes qui sortent des écoles pour tenter de faire leur place dans l’industrie, selon les données du ministère de l’Éducation. Un chiffre qui peut être doublé si l’on tient compte de ceux et celles qui étudient en arts visuels et pour qui l’industrie offre aussi beaucoup de débouchés, précise Philippe Valentine.

« Dans les dernières années, ils ont presque tous été intégrés dans les entreprises, mais malheureusement, on a vu que c’était un peu plus difficile dans les derniers mois », signale Jean Jacques Hermans.

Une situation qui s’explique en partie par l’incertitude économique du moment, qui affecte toutes les entreprises, peu importe le secteur, mais également par le manque de ressources expérimentées pour encadrer les plus jeunes qui touche particulièrement le domaine du jeu vidéo. D’après lui, un studio aurait ainsi besoin de conserver un ratio d’environ une personne d’expérience pour une dizaine de recrues pour que les choses roulent rondement.

Il ne s’inquiète toutefois pas trop pour ceux et celles qui sont près de se pointer sur le marché. « Ce genre de creux est cyclique, je n’ai pas peur que les passionnés qui persisteront ne se trouvent pas quelque chose », fait-il remarquer.

Un optimisme partagé par Philippe Valentine : « De plus en plus de jeunes se lancent directement sur le marché avec leurs propres concepts de jeux grâce à leur expertise développée à l’école. Ce ne sont plus seulement les seniors qui lancent leurs propres studios; les jeunes le font aussi et ils réussissent. »

Un milieu de moins en moins homogène

Les jeunes qui arrivent sur le marché ainsi que les innombrables travailleurs et travailleuses de l’étranger qui ont débarqué à Montréal pour participer à l’industrie ont aussi mené à une diversification de la main-d’œuvre, qui rend la ville encore plus attrayante pour les entreprises, souligne Philippe Valentine.

« L’idée qu’on se faisait il y a 15 ans des travailleurs du jeu vidéo qui étaient de jeunes hommes blancs qui travaillaient dans leur sous-sol est révolue », indique Jean Jacques Hermans. Autre avancée : environ le quart des personnes qui travaillent dans l’industrie sont maintenant des femmes, se réjouit le directeur général de La Guilde, même s’il concède qu’il reste du chemin à faire de ce côté.

 

Source de la photo : Ubisoft Montréal

 

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