David St-Onge : l’interdisciplinarité incarnée

Professeur agrégé au département de génie mécanique de l’École de technologie supérieure (ÉTS), David St-Onge est un ambassadeur du lien fécond existant entre le génie et les arts. Depuis des années, il réalise des projets qui intègrent abondamment les disciplines artistiques. 

David St-Onge nous accueille dans le petit local, au sein de l’établissement scolaire montréalais, où se réunissent les artistes en résidence du programme Artistes en laboratoire, qu’il a mis sur pied. Pour mettre en valeur cette collaboration, une sculpture réalisée par Nicolas Reeves, artiste et professeur à l’École de design de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), vient d’être installée devant cette salle.

Depuis 2019, David St-Onge enseigne le génie mécanique à l’ÉTS et dirige le laboratoire INIT Robots. « Je voulais travailler sur de beaux projets collaboratifs hors science, et le milieu universitaire était probablement le plus adéquat pour cela, témoigne-t-il. Dès le début, les artistes et les ingénieurs peuvent travailler main dans la main. »

Entre pédagogie et recherche

Les atouts de la combinaison des arts et du génie peuvent se résumer en deux volets, selon le professeur : la pédagogie et la recherche. Depuis qu’il est en poste, David St-Onge demande systématiquement à ses élèves en génie mécanique de réaliser des projets de fin d’études dont le client évolue dans le domaine artistique de façon professionnelle. « C’est une façon différente de communiquer, précise-t-il. Le client a besoin d’un produit qui aura un impact fondamental sur son œuvre et dont il doit comprendre le système. »

Comment intégrer les demandes du client au fil de la conception mécanique? L’idée est-elle bien vulgarisée? Comment appréhender la dimension esthétique? « On ouvre la perception des étudiants à ces considérations pour leur permettre d’avoir une vision plus holistique des conceptions mécaniques sur le marché du travail, poursuit le professeur. Il faut réfléchir à la poésie de l’objet, c’est-à-dire la relation avec ses usagers, son environnement, son contexte d’utilisation. Ça va plus loin que de penser à la forme. » Des concepts qui sont enseignés en design, mais peu en génie mécanique.

Côté recherche, David St-Onge estime qu’au moins 75 % des projets de son laboratoire ont une dimension artistique. Actuellement, il travaille sur un projet de structures de ballon dirigeable, toujours avec Nicolas Reeves. L’objectif est de faire voler ces objets plus longtemps, les rendre plus robustes et plus légers, tout en réfléchissant à une forme « explosée ». Cette démarche s’achèvera par une performance artistique.

Dans le programme PRISME, qui finance des projets mariant les arts et les sciences, le professeur s’intéresse à l’expressivité de groupes de robots. L’idée est d’essayer d’extraire des données sur le mouvement pour optimiser la trajectoire des robots afin qu’elle soit plus lisible et moins opaque lorsque vient le temps de les faire fonctionner. « Aucun algorithme ne fait ça, et c’est ce qu’on cherche à développer », affirme le visionnaire, qui travaille beaucoup avec des essaims de robots. En collaborant avec des marionnettistes et des chorégraphes, entre autres, son équipe et lui tentent de répondre à cette problématique en s’inspirant de la fluidité et du caractère instinctif du mouvement artistique. 

Une vocation

À la fin de l’adolescence, David St-Onge aimait explorer l’écriture dramatique et le jeu dans son cours de théâtre, autant qu’il se passionnait pour le bricolage du moteur de sa voiture les fins de semaine. Au cégep, alors qu’il se questionne sur sa future carrière, une vidéo du Cirque du Soleil centrée sur le développement de gréements acrobatiques par des ingénieurs a provoqué chez lui un déclic. « J’ai compris que c’était ce que je voulais faire », lance-t-il.

Avec cet objectif en tête, il s’inscrit en génie mécanique à l’École Polytechnique de Montréal et collabore pour la première fois — et non la dernière — avec Nicolas Reeves sur un projet de robot volant. Après son baccalauréat, David St-Onge intègre Hexagram, un réseau interdisciplinaire qui se consacre à la recherche-création en abordant les relations entre les arts, les cultures et les technologies. Il est aujourd’hui cochercheur au sein de ce regroupement.

Suivant ce fil conducteur, le chercheur a travaillé dans un atelier de décor pour le théâtre et a réalisé de nombreuses installations interactives pour les musées, dont l’Insectarium de Montréal. « Dans les dernières années, je faisais davantage de projets interactifs, souligne-t-il. J’adore observer et stimuler la réaction du public, concevoir quelque chose de fascinant pour rendre la visite d’un lieu culturel plus dynamique. 

Sa curiosité sans limites l’a ensuite poussé vers une maîtrise en robotique à l’Université Laval, puis un doctorat en robotique spatiale sur les mécanismes déployables et un postdoctorat en robotique mobile à Polytechnique. Il a également suivi un microprogramme en études russes et s’est rendu à Moscou, une culture où l’apprentissage d’un poème est aussi important que la suite de Fibonacci.

Parallèlement à ses études, David St-Onge a continué ses activités d’ingénieur à son compte, la plupart avec des artistes, des théâtres et des cirques. L’un des projets d’envergure qu’il a réalisés, Truck Stop, est une caravane qui a été conçue pour la compagnie Machine de cirque, qui s’ouvre et se déploie afin de se transformer progressivement en une scène de spectacle.

Son prochain projet? Concevoir des bouées qui permettent aux municipalités de mieux connaître la santé de leurs lacs en temps réel ainsi qu’une installation audiovisuelle permanente pour conscientiser la population à cet enjeu, de manière poétique.

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